EN CE TEMPS-LA
FACHES-THUMESNIL

L'abbé Lepoutre … ou le village de Faches rassemblé

Son projet était de fournir un local de colonie de vacances à sa paroisse d'origine, la paroisse Saint Martin à Roubaix. Baptisée "Manoir de Menneville", la propriété plutôt négligée a été aménagée au fil des années, ce fut le début d'un nouvel épisode qui a resserré nos relations. J'y ai beaucoup appris. J'ai passé dans ce fameux manoir toutes mes vacances à partir de 1933 jusqu'à la guerre en août 1939. Ce fut un temps merveilleux où j'ai apprécié les nombreux talents de l'abbé et son zèle sacerdotal. On s'est maintes fois disputés, car il avait tout de même du sang de patron dans les veines, et il savait être cassant, mais on s'est toujours réconciliés, généralement sans paroles, plutôt par des gestes. Les premières vacances échinghennoises en 1933 se sont résumées à déblayer le terrain pour bâtir. Nous avons scié bon nombre d'acacias et essarté le tour de la maison, appelée pompeusement dans le pays, le Château Baron, du nom des Anglais qui l'occupaient. La maison était vide mais l'abbé avait demandé à conserver de l'ancien mobilier un piano. Il m'est venu à point pour l'accompagner dans son répertoire au cours de nos soirées. La nouvelle colonie accueillait à tour de rôle de juillet à septembre une quarantaine d'enfants et fut bientôt doublée d'un étage pour accueillir un autre groupe de quarante. Quand à la vieille maison, elle a été transformée par nos soins pour devenir un centre de vacances appelé d'un mot latin "Ad Vitam", vers la vie. Tout un programme ! On y accueillait des jeunes gens, seuls ou en groupe, durant les vacances d'été … Avec l'abbé j'ai du apprendre l'intendance, la gestion, passer le permis de conduire, toucher à tous les métiers du bâtiment. Dieu sait si on en a remué du ciment, du sable, des moellons, du bois, du fibrociment. La guerre a mis fin à cette aventure, elle a tourné la page. Elle nous a séparés … Ses amis disaient avec humour que dans la vie de l'abbé il y avait divers âges, comme en géologie, l'âge du fer, l'âge du béton, l'âge du contreplaqué, celui du plein cintre à chaque fenêtre comme au garage d'Echinghen. Mais il y avait toujours cette étonnante jeunesse qui ne le quittait pas …"

Manoir de Menneville à Echinghen, la chapelle
(collection Jacqueline Dugrain)

Manoir de Menneville à Echinghen, le grand dortoir
(collection Jacqueline Dugrain)

Manoir de Menneville à Echinghen, la salle à manger
(collection Jacqueline Dugrain)