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EN CE TEMPS-LA
FACHES-THUMESNIL

DEUX ANS DE CAPTIVITE CHEZ LES ALLEMANDS.
3 Novembre 1916 – 11 Novembre 1918.

7. Courville, Ventelay, Amifontaine (Juillet 1918 - Aout 1918)

Le 15 juillet nous recevons l’ordre de nous diriger sur Courville. Le départ a lieu à trois heures. Quoique la route fût bonne, nous arrivâmes fatigués vers sept heures et demies. Après une nuit troublée par des visites d’avions, nous allons travailler sur la route de Fismes. Le soir on nous fait changer de camp pour nous forcer à y retourner le lendemain soir. La situation à cette époque est loin d’être gaie ; nous avançons en effet de plus en plus vers le front, nous recevons la nuit des visites des aéros, d’où pour nous, impossible de dormir, et c’est encore exténués qu’il fallait partir au travail le matin. Enfin aucun colis ne nous parvenant plus, le moral pour toutes ces raisons, baissa fort chez nous. De Courville on nous fit aller travailler à trois ou quatre kilomètres du front à Prin ( ?) ou Prior ( ?), où nous voyons autour de nous éclater nombre d’obus .

A peine arrivés depuis cinq ou six jours, nous fûmes bombardés par des avions, deux projectiles tombèrent à deux mètres de notre baraque, sans éclater heureusement. Nous devions bien nous y attendre, car, vraisemblablement les aviateurs nous voyant fuir dans toutes les directions, nous prenaient pour des soldats.

Le 26 juillet 1918, nous quittons Courville, à destination de Ventelay. La joie fut générale, car le fait de retourner en arrière était pour nous la preuve du recul des Allemands . Nous dûmes bientôt en rabattre car après avoir parcouru dix kilomètres, il nous fallut, tout couverts de sueur stationner sous une pluie violente qui eut vite fait de nous tremper. La réaction, bien entendu, fit grand tort à quelques-uns de nous qui furent sérieusement malades. La nuit que nous passâmes à notre camp fut mauvaise à cause de la pluie qui tombait sur nos têtes, les autres furent semblables ; couchés sur la dure, depuis le début de Montigny, il ne nous était guère possible de nous remettre des fatigues et des souffrances de la journée. L’eau potable, enfin, manquait. On voit combien furent pénibles ces quatre jours que nous passâmes à Ventelay. C’est là que nous quittons le fameux sergent Kries, à la joie générale.

Le 1er août, nous nous mettons en route pour Amifontaine (c’est une étape en arrière). Nous avions presque tous des petites charrettes ou des porte-mitrailleuses où nous posions nos bagages. Partis à sept heures de Ventelay nous eûmes à stationner deux heures et demies avant de pouvoir nous placer entre des colonnes d’artillerie en retraite, et après cinq ou six heures de marche nous arrivâmes à Amifontaine, exténués et mourant de faim. Le ravitaillement n’était pas arrivé, nous dûmes l’attendre trois jours pendant lesquels nous ne reçûmes absolument rien. Le troisième jour enfin, on nous servit une soupe, mais tellement mauvaise que personne ne sut la manger malgré la faim terrible qui nous tenaillait. Cette journée fut signalée par l’évasion de 44 des nôtres dont beaucoup malheureusement furent repris. Le lendemain, après avoir touché notre arriéré de pain nous fûmes affectés à des travaux d’entretien des routes.

Ensuite nous fûmes journellement témoins du commencement de la débâcle boche. Les chevaux (manque de soins) crevaient sur la route et y restaient jusqu’à putréfaction complète. Quelques uns des nôtres eurent la corvée d’en enterrer. Les blessés se traînaient lamentablement sur la route, s’appuyant les uns sur les autres. Le ravitaillement devenait difficile et nos colis n’arrivaient plus faute de transports. C’est à cette époque que la grippe fit son apparition chez nous.