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EN CE TEMPS-LA
FACHES-THUMESNIL

La rue du Chevalier de La Barre à Faches-Thumesnil.
Jean François Lefebvre, chevalier de La Barre.
Abbeville 1747 - 1766.


Ne la cherchez pas, elle n'a jamais existée. Pourtant, il s'en est fallu de peu.

Mais qui était le chevalier de La Barre ?

"Il y avait dans Abbeville, petite cité de Picardie, une abbesse [note], fille d'un conseiller d'Etat très estimé. Une dame aimable, de mœurs très régulières, d'une humeur douce et enjouée, bienfaisante et sage sans superstition. Un habitant d'Abbeville, nommé Belleval, âgé de soixante ans, vivait avec elle dans une grande intimité parce qu'il était chargé de quelques affaires au couvent. Il est par ailleurs lieutenant d'une espèce de petit tribunal qu'on appelle "l'élection", si on peut donner le nom de tribunal à une compagnie de bourgeois uniquement préposés pour régler l'assise de l'impôt appelé la taille. Ce Belleval devint amoureux de l'abbesse qui ne le repoussa d'abord qu'avec sa douceur ordinaire mais qui fut ensuite obligée de marquer son aversion et son mépris pour ses importunités trop redoublées. L'abbesse fit venir dans ce temps là, en 1764, le chevalier de La Barre, son neveu, petit fils d'un lieutenant général des armées mais dont le père avait dissipé une fortune de plus de quarante mille livres de rentes. Elle prit soin de ce jeune homme comme de son fils et elle était prête de lui faire obtenir une compagnie de cavalerie, il fut logé dans l'extérieur du couvent et madame sa tante lui donnait souvent à souper, ainsi qu'à quelques jeunes gens de ses amis. Le sieur Belleval, exclu de ses soupers, se vengea en suscitant à l'abbesse quelques affaires d'intérêt.

Le jeune de La Barre prit alors vivement le parti de sa tante et parla à cet homme avec une hauteur qui le révolta entièrement. Belleval résolut de se venger, il sut que le chevalier de La Barre et le jeune d'Etallonde, fils du président de l'élection, avaient passé depuis peu devant une procession sans ôter leur chapeau, c'était au mois de juillet 1765. Il chercha dès ce moment à faire regarder cet oubli momentané des bienséances comme une insulte faite à la religion. Tandis qu'il ourdissait secrètement cette trame il arriva malheureusement que, le 9 août de la même année, on s'aperçut que le crucifix de bois posé sur le pont neuf d'Abbeville était endommagé, et l'on soupçonna que des soldats ivres avaient commis cette insolence impie."

L'évêque d'Abbeville, également évêque d'Amiens donna à cet incident une importance non méritée. Il vint faire une procession solennelle auprès de ce crucifix et on ne parla dans Abbeville, pendant une année entière, que de sacrilèges. Les bruits couraient qu'une nouvelle secte brisait tous les crucifix, jetait à terre les hosties. Le sieur Belleval enquêta sur le jeune chevalier et questionna beaucoup de proches, il ne trouva aucun indice quant à la mutilation du crucifix. Ne restait à lui reprocher que le fait de ne pas s'être découvert au passage d'une procession et aussi d'avoir chanté une fois des chansons libertines. Belleval s'en alla pourtant déposer sa plainte chez le premier juge de la sénéchaussée de la ville. Les témoins, intimidés, furent entendus. Lors d'une perquisition à son domicile on va découvrir trois livres interdits dont le "dictionnaire Philosophique" de Voltaire. Le 13 août 1765, six témoins déposèrent avoir vu passer trois jeunes gens à trente pas d'une procession et que, parmi eux, de la Barre et d'Etallonde gardèrent leurs chapeaux sur la tête. Un nommé Bauvalet déposa que le chevalier avait proféré un mot impie en parlant de la Vierge… Nicolas Lavallée déclarera avoir entendu le chevalier chanter deux chansons libertines de corps de garde . Belleval sut s'y prendre pour inviter les petites gens à porter des accusations contre des personnes socialement plus élevées qu'elles et dont elles sont toujours jalouses.