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EN CE TEMPS-LA
FACHES-THUMESNIL

De l'entretien des chemins aux XVIIème et XVIIIème siècles ……

Louis XIV, roi de France, vient de conquérir la Flandre. La paix d'Aix la Chapelle reconnaît sa conquête en 1668. Dans cette province, l'état de guerre avec ses cortèges de charrois spéciaux et le passage des troupes d'une part, le laisser-aller dans l'entretien des voies de communication d'autre part, avaient concouru à la dégradation de ces dernières. En Flandre, l'entretien du réseau routier principal ne relève pas du régime des corvées royales ou seigneuriales. Par contre, celui du réseau secondaire est effectué par les riverains. Rappelons qu'il est majoritairement constitué de terre tassée par le passage des chariots de ferme ou de transport. Nous allons examiner la réglementation générale applicable à l'entretien de ces chemins et examiner son application dans un village de la châtellenie de Lille.

La réglementation générale.

Un règlement du 8 avril 1671, pris en Conseil Souverain de Tournai, définit l'organisation à mettre en place pour assurer la réparation des chemins. Complément nécessaire, il fixe également les contrôles à exercer et les sanctions qui peuvent éventuellement être prises en cas de non respect des instructions. Le texte, largement diffusé sous forme d'un "placard" de dimensions 50x40 cm est envoyé à l'ensemble des responsables locaux. Il paraît intéressant d'en analyser le contenu qui restera d'actualité et servira de référence jusqu'à la Révolution. Arbitrairement, il peut se diviser en dix parties.

1- un constat de situation
Des plaintes journalières sont adressées au Procureur du Roi, sur le mauvais état des chemins, surtout en hiver, ce qui est contraire à « l'intérêt du public et des particuliers » pour voyager ou transporter les marchandises. La faute en est aux propriétaires des terrains les bordant, tenus à leur réparation, mais aussi aux Officiers de justice chargés du contrôle et tenus d'exercer des contraintes envers les défaillants.

2- la continuation de l'application des textes antérieurs
Il est alors stipulé que la réglementation édictée par l'administration antérieure, c'est à dire l'administration espagnole, doit continuer à être appliquée : « Que les édits tant généraux que particuliers, ci-devant faits et publiés … touchant les réparations des chemins publics, soient gardés et observés ponctuellement selon leur forme et leur teneur … »
Philippe II d'Espagne avait codifié ce domaine le 3 février 1570 dans une ordonnance, en langue flamande, prise à Anvers et comprenant treize articles que l'on peut résumer ainsi :
- les responsables des communautés (baillis, mayeurs…) feront réparer les chemins par les riverains de ceux-ci, à la fin mai ou après, si les assèchements par suite des intempéries de l'hiver ne sont pas effectifs.
- l'Officier (bailli ou son représentant), accompagné d'échevins, sera tenu « de faire promptement l'écouage et visite » des chemins. Les réparations non effectuées le seront aux dépens du défaillant.
- les travaux à exécuter pour mettre en état les chemins sont nettement définis : « article 5, et afin que lesdits chemins et mauvais endroits puissent être dûment réparés et entretenus, lesdits officiers et gens de loi auxquels ils appartiennent, feront des deux côtés diceux faire des fossés dont ils feront jeter et aplanir dans le milieu les terres qui en sortiront, en faisant donner auxdits chemins leur vraye largeur et abattre tous les arbres, bois, hayes qui dans ou sur les bords desdits chemins, dans les places et quartiers où l'on trouvera qu'ils font grand dommage aux chemins et nécessaire de les ôter sans pour ce devoir payer aucune chose au propriétaire. »
- il en est de même pour tous les fossés, canaux, rigoles et « coulans d'eau » qui seront creusés pour que l'écoulement des eaux puisse s'effectuer sans oublier éventuellement où cela est nécessaire, d'étayer les bords avec des pilotis et piquets.
Le règlement de 1671 n'est donc pas une première. Il va largement s'inspirer de la réglementation antérieure, la définir, la fixer en tant que réglementation française.

3- la désignation de ceux qui doivent assurer l'entretien
Tout le monde est tenu d'assurer ou de faire exécuter le travail nécessaire à l'entretien. « Ecclésiastiques et séculiers, privilégiés et non privilégiés » sont soumis aux mêmes obligations si leur propriété borde le chemin. Remarquons que l'égalitarisme dans l'application des mesures n'est qu'apparent. Le possesseur ou l'exploitant d'un lot de terre ayant une grande longueur en bordure de chemin et une petite profondeur est plus corvéable que celui possédant un terrain de dimensions inverses. De plus celui qui ne possède pas de terre en bordure de chemin n'est pas soumis à la corvée d'entretien.

4- la description des travaux à réaliser
Les travaux à effectuer sont aussi minutieusement exposés : « les riverains entretiennent les chemins et voies à la largeur qu'ils doivent être, … ils les rétablissent en l'état d'origine. Dans les quinze jours après la parution de la présente publication, les chemins, mauvais trous, dégâts seront réparés, … de telle sorte que les chartons, voituriers et autres puissent charier et mener leurs denrées, marchandises et autres choses nécessaires. »

De plus, s'ils n'existent pas ou plus, les propriétaires ou occupeurs concernés devront établir des fossés « de cinq pieds de large par le haut et d'un pied et demi par le bas et cinq pieds de profondeur. La terre ainsi enlevée sera jetée au centre du chemin et nivelée pour que l'eau puisse s'écouler dans les fossés. »

5- la périodicité de cette remise en état
Les travaux d'entretien et de remise en état doivent être réalisés chaque année après la publication des bans de mars, soit au cours du deuxième trimestre de l'année.

6- l'entretien des ruisseaux ou becques
Est également abordé selon le mêmes principes. Il en est de même pour les ponts.

7- l'exception à l'obligation d'entretien
La proclamation prévoit le cas des propriétaires impécunieux ou possédant une petite terre sans valeur et n'ayant pas les moyens d'effectuer les travaux d'entretien définis ou nécessaires. La paroisse du lieu devra prendre en charge les travaux.

8- les contrôles et leurs suites
Dans un long paragraphe, sont abordées l'exécution du contrôle et les sanctions à appliquer aux défaillants. La visite devra s'effectuer quinze jours après la publication du règlement et les années suivantes, quinze jours après la publication des bans de mars. Les baillis, lieutenants et officiers des seigneurs, accompagnés des échevins en seront chargés. Lors du constat des travaux non effectués, y compris la destruction des arbres et plantes indûment poussés, ils les feront faire, aux frais et dépens du propriétaire ou occupants ou leur enjoindront de les exécuter rapidement avant une nouvelle visite qui devra se dérouler un mois après.

9- la responsabilité des autorités de contrôle
La défaillance et la dissimulation commises par les autorités chargées du contrôle mettront leur responsabilité personnelle en jeu, sanctionnée par l'octroi d'amendes ou l'obligation de l'exécution des travaux à leurs propres dépens.

10- le règlement se termine en la forme habituelle relative à sa publication
« Et afin que personne ne prétende cause d'ignorance de la présente Ordonnance, sera icelle publiée en l'audience du Conseil des Plaids tenans, et pour l'étendue du ressort d'icelui, ensemble affichés ès lieux publics et accoutumés. Ainsi fait et résolu au Conseil souverain de Tournay le huitième d'avril 1671. Paraphée BLYE. Publiée en l'audience du Conseil souverain de Tournay les Plaids tenans le dixième d'avril 1671. »