Les
trente dernières années ont vu une multiplication des découvertes
archéologiques dans la région lilloise. La plupart d'entre
elles, livrées aux pioches des démolisseurs au nom d'intérêts
économiques ou commerciaux, ne subsistent plus qu'en souvenir.
Est-il possible d'allier développement de la ville et préservation
de son patrimoine archéologique ? La voie apparaît bien
étroite.
En
mars 1963, les fondations de la crypte de l'ancienne Collégiale
Saint Pierre sont mises au jour sur le chantier du futur palais de justice.
La découverte est d'importance : cette crypte du XIe siècle,
seul vestige de l'église détruite à la Révolution
Française, est la plus ancienne de la région et aurait abrité
une portion de la chaîne ayant servi à attacher Saint Pierre après
la mort de Jésus. Cela n'empêche pas les travaux de continuer.
Les ruines de la crypte sont enfermées dans un sarcophage de béton
qui en interdit l'accès en dehors des Journées du patrimoine
et condamne les vestiges à un quasi-abandon.
Fortifications
sacrifiées
L'exemple
est parlant : le nécessaire développement de la ville
et la sauvegarde de son patrimoine archéologique ne font pas toujours
bon ménage. A plus forte raison quand des intérêts
économiques entrent également en ligne de compte. Ce qui
fut le cas quand, entre 1990 et 1992, le fort Sainte-Agnès et la
demi-lune des Buisses construite par Vauban furent détruits, l'un
parce qu'il gênait le passage des voies TGV, l'autre parce qu'il
empêchait l'extension d'un parking. Des destructions fort onéreuses
au dire des maîtres d'ouvrage, qui auraient pu, au moins en partie,
être évitées.
De
même, la construction du quartier Euralille n'a été
rendue possible que grâce aux soustractions faites sur les anciennes
fortifications qui entouraient la ville. Dès 1994, l'association
Renaissance du Lille Ancien s'alarmait du « sort dramatique
des fortifications militaires de Lille », dont les vestiges
étaient sacrifiés les uns après les autres. Sans
relâcher sa vigilance, elle constate aujourd'hui, comme la conservatrice
de l'Hospice Comtesse Catherine Monnet, une meilleure gestion des sites
archéologiques de la région lilloise.
Des remparts en
sursis
La
politique des pouvoirs publics a-t-elle vraiment changé dans les
dernières années ? Le sort réservé aux
remparts découverts récemment sous l'ancien cinéma
Gaumont de la rue de Béthune apportera certainement une réponse
définitive. Il s'agira d'arbitrer entre l'agrandissement d'un parking
souterrain et la conservation de remparts datant du XVe siècle.
Mêmes questions pour le chantier dit des "Pauvres Claires",
rue de Paris, où les restes d'un ancien couvent sont actuellement
passés au peigne fin.
La
solution passe certainement par une politique autre que celle à
courte vue qui a prévalu, de l'aveu même de Catherine Monnet,
dans les années 80. Pour que les trésors qui restent enfouis
dans les sous-sols lillois ne connaissent pas le sort peu enviable de
leurs prédécesseurs déjà découverts.
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également : "Lille aux trésors"
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