
(photo : Blandine Flipo)
Catherine
Monnet
conservatrice au musée lillois de l'Hospice Comtesse
« J'attends
avec impatience la découverte d'un site entier, d'un vrai village
néolithique. »
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Haches,
poteries, épées, pièces de monnaie, céramiques,
murs... Le sous-sol lillois foisonne de traces laissées par nos
ancêtres. Le patrimoine archéologique représente un
témoignage irremplaçable sur la vie des hommes qui ont occupé
"l'île" depuis la Préhistoire. Mais sous les pavés
dorment probablement d'autres merveilles.
Chercher, rechercher, répertorier, identifier, dater. Comparer,
classer, localiser, cartographier. Et recommencer. Catherine Monnet, conservatrice
du musée lillois de l'Hospice Comtesse, n'a pas chômé.
Pendant trois années, elle a localisé toutes les découvertes
archéologiques réalisées dans le sous-sol de Lille.
Au bout de ce « travail de fourmi épuisant »,
qui a permis de recenser « 90 à 95 % des découvertes
faites sur le territoire », un enseignement majeur : les
premiers Lillois entretenaient avec la Deûle des relations privilégiées.
Il
se trouvait là tout ce que les hommes recherchaient, en particulier
la force hydraulique et les voies fluviales. Voilà pourquoi tous
les objets et lieux retrouvés se situent entre le Vieux Lille et
le quartier Vauban : il s'agit bel et bien de l'ancien cours
de la Deûle.
Des outils de
plus de 4000 ans
Le territoire lillois est une des parties les plus riches d'un département globalement assez pauvre sur le plan archéologique. Les objets les plus anciens qui aient été exhumés datent du Néolithique. Un outil en silex sous la place Rihour, une hache polie en bois de cerf sous la rue Solférino ou encore une hache en os sous la rue Desmazières reposaient là depuis plus de 4000 ans.
En
plus de leur valeur esthétique, les objets permettent d'en savoir
plus sur la vie des Lillois et sur leurs relations avec les autres peuples.
Par exemple, les pièces métalliques datant de l'âge
du Fer attestent le passage d'Anglais et de Bretons : ils apportaient
l'étain dont était dépourvu le sol lillois. Et voilà
comment une partie de l'histoire économique de la région
peut être déduite de la présence d'un poignard en
bronze sous la rue Ampère ou d'une hache sous le boulevard de la
Liberté.
Tomber sur « un
gros coup »
En
général, c'est sur les chantiers de construction que sont
repérés les objets, à une profondeur de trois à
six mètres. Lors d'une surveillance de travaux, square Dutilleul,
un observateur a trouvé, au milieu des pelles mécaniques,
une épée de fer parfaitement conservée. Cette pièce
quasiment unique se trouvait là depuis le Ier siècle avant
notre ère, dans les sables gris de l'ancien lit de la Deûle.
Elle a été confiée au musée de l'Hospice Comtesse,
où on peut l'admirer, jusqu'au mois de juin, à l'occasion
d'une exposition baptisée « L'île avant Lille ».
Les
découvertes, aujourd'hui, sont très régulières.
Mais les archéologues espèrent tomber sur « un
gros coup ». Ce n'est pas d'un trésor qu'ils rêvent
tous : on a déjà mis la main, au bord de la Deûle,
sur une bourse contenant une quarantaine de monnaies différentes.
Rien d'autre, selon Catherine Monnet, qu'un « petit trésor
classique » datant de la période gallo-romaine. Ce qu'elle
attend plus impatiemment, c'est la découverte d'un site entier,
d'un vrai village néolithique.
Elle
aimerait aussi voir sortir de terre des barrages, des barques ou des ponts
qui témoigneraient de l'importance de l'eau autour de "l'île".
De telles découvertes sont probables, même si les chantiers
de construction sont trop peu nombreux au goût des archéologues.
Alors, pour connaître le Lille ancien, rajeunissons le Vieux Lille !
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