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Dans
l'un des sous-sols de l'avenue du Peuple belge, sous une bâtisse
trois fois centenaire, Angelo et Pierre organisaient il y a quelques mois
des soirées "clandestines" sous les voûtes. Victimes
de leur succès, ils ont mis fin à cette activité.
Pierre envisage de donner une nouvelle vie à cette superbe cave,
dans un cadre plus légal.
« A
la base, la moquette était superbe ». Angelo se rappelle,
enthousiaste. Lui et son copain Pierre jettent un regard un peu
nostalgique sur le sol de leur immense cave. Il y a quelques mois encore,
ils y accueillaient plus de deux cents personnes pour une fête en
sous-sol, ambiance reggae, briques rouges et voûtes basses.
De
ces folles nuits souterraines, il ne reste plus que quelques vestiges,
comme ce masque africain en carton abandonné au pied d'un mur, ou cette
estrade en bois qui servait de scène. Et la fameuse moquette, d'un rouge
désormais bien fade, tâchée par l'eau boueuse.
« On a parlé
de cave... »
Pierre
est calme et bien mis. La grande bâtisse, qu'il a hérité de son père,
lui appartient. Il gère les salons de réception qui occupent les
étages. Angelo porte des longs cheveux blonds bouclés et un pull-over
bariolé. Tous deux sont membres de l'association "Tous
frères", investie dans la promotion de groupes de musique.
Angelo
rencontre un jour un certain Todo, justement musicien, séduit par son
activité. « On a parlé de cave, et puis on a tilté »,
explique le jeune homme. Avec ses amis, ils organisaient déjà de grandes
fêtes dans un château de la Somme. Cette cave, c'était, à leur porte,
l'atmosphère qu'ils recherchaient.
« J'ai
demandé à Pierre, et il a dit oui » poursuit
Angelo, « c'est un artiste !» La première
soirée a eu lieu en juin 2000. « Là, il y avait
le sound-system, là un petit bar, là on avait installé
des toilettes... » Angelo bondit d'une pièce à
l'autre. « Ici, il y a un écho fou, ça change
la voix, vous entendez ? » On entend... et on imagine.
« La première fois, il y avait un groupe de reggae,
et après de la salsa, » se souvient Angelo. La chaleur
des tropiques à quelques mètres sous terre.
Risque d'infraction
Le
bouche à oreilles aidant, les soirées ont dépassé le succès espéré.
Or, rien de tout cela n'était déclaré, et les installations n'étaient
pas aux normes. La cave de l'avenue du Peuple belge commençant à faire
parler d'elle, les deux copains, plutôt que de risquer la mise en
infraction, décident d'en rester là. En octobre 2000, la troisième
fête est aussi la dernière. « Le but n'était pas de faire de
l'activité au black » explique Pierre.
Le
jeune homme a des projets. La cave voûtée de 400 m2, dont
la moitié reste inaccessible, pourrait devenir « un
restaurant, un salon de réception, voire un espace d'exposition
ou de spectacle ». « J'aimerais que ce soit fini
en 2004, quand Lille sera capitale culturelle de l'Europe »,
précise Pierre.
Les
travaux de mise aux normes achevés, c'est donc une nouvelle vie
qui attend le magnifique sous-sol de cette bâtisse construite en
1701, classée monument historique. Après avoir servie en
trois siècles d'entrepôt de denrées, de réserve
de pierre pour des sculpteurs de gisants, de cave
à charbon*... et de boîte de nuit clandestine.
*L'avenue
du Peuple belge était autrefois un canal. Les sous-sols qui le
bordent servaient d'entrepôts pour les marchandises venues par bateau.
Un réseau souterrain permettait l'acheminement des marchandises
aux différents endroits de la ville. (retour)
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